Brigitte Vilain :
Association Astrée
"Les personnes qui sont dans la peine ont très peu d’endroit où être entendues."
Pendant la chaleureuse période des fêtes de fin d’année, la solitude reste un sentiment ancré chez de nombreux français. Brigitte Vilain est responsable de l’antenne de Lille de l’association Astrée. Cette association propose un accompagnement à long terme contre la solitude.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis Brigitte Vilain, retraitée et bénévole chez Astrée depuis un petit moment déjà. Toute ma vie, j’ai eu à cœur de rendre la société plus solidaire. C’est dans mes valeurs. J’ai déjà fait d’autres bénévolats et j’ai ensuite découvert l’association Astrée. J’aime particulièrement écouter les personnes. Ça m’a poussée à m’engager.
Qu’est-ce qu’Astrée ?
Astrée est une association reconnue d’utilité publique. Notre but est de rétablir le lien social et de rompre l’isolement par l’écoute. Je trouve que les personnes qui sont dans la peine ont très peu d’endroit où être entendues. L’écoute d’Astrée est vraiment une écoute de qualité. J’insiste néanmoins sur le fait que c’est une démarche qui doit venir de la personne elle-même avec le but de rompre l’isolement pour redevenir autonome. Une volonté de ce genre ne s’atteint pas avec un simple coup de fil mais avec une vraie attention quotidienne et sur le long terme.
Nous avons aussi développé une mission « collège » où là on essaie de créer du lien entre les élèves. On forme des groupes de collégiens qui vont veiller sur les plus jeunes. Récemment, nous avons également mis en place une aide autour de la sortie d’hôpital. Ce projet n’est pas encore développé dans l’antenne de Lille.
D’autres projets sont-ils en train de se mettre en place ?
Au niveau des bénévoles, nous avons peu de latitude pour innover, entamer de nouveaux projets. C’est le rôle de l’équipe d’administration. Je me souviens que des bénévoles de Lille voulaient créer des groupes de paroles. On nous le demande souvent.
© Astrée
Nous sommes en période de fêtes, constatez-vous une plus grande demande à ce moment de l’année ?
Nous ne voyons pas un vrai phénomène accru lors des fêtes. L’accompagnement chez Astrée est un accompagnement dans la durée. Il dure environ dix-huit mois. D’autres associations comme SOS amitié reçoivent des appels de personnes dans des moments d’angoisse. On peut donc penser qu’ils ont une activité plus importante lors des fêtes. Notre demande reste forte mais l’est sur toute l’année.
Qui sont les personnes qui vous contactent ?
On voit relativement peu de jeunes. La plus grande part des demandes est faite par des hommes et des femmes qui ont entre 30 et 80 ans. On ne distingue pas de réel type de population : on voit des retraités, des actifs ou des chômeurs de tous genres. Ce sont toujours des gens qui souffrent à la suite d’un événement de la vie.
Qu’entendez-vous par « événement de la vie » ?
On nous contacte pour beaucoup de raisons. Cela peut être pour un souci au travail : chômage ou même reconversion. On fait aussi face à des deuils, des séparations ou des soucis au sein de la famille. On aide beaucoup de séniors isolés qui n’ont pas de famille ou alors une famille qui habite loin. On suit parfois des personnes qui souffrent de maladies invalidantes.
Apportez-vous aussi un accompagnement médical ou psychologique ?
Nous n’en apportons pas. Nous restons réellement dans l’écoute active. Cette écoute est centrée sur la personne. Il n’y a pas de conseil qui sont donnés. L’individu doit pouvoir faire son chemin lui-même. On donne juste un coup de pouce.
Ça peut nous arriver de conseiller d’aller consulter un professionnel hors de l’association. Cela se fait lorsqu’on sent que la personne est en grande difficulté. Parmi ceux qui nous contactent, certains sont déjà suivies en CMP (centre médico-psychologique), par des psychologues ou par des psychiatres.
© Astrée
Qui sont les bénévoles qui vous entourent ?
On a vu un grand changement ces dernières années. Avant, c’était beaucoup de retraités ou des personnes qui ne travaillaient pas. Depuis le Covid, c’est un autre engagement qui s’est mis en place. Nous avons moins de retraités et plutôt des jeunes actifs. Nous avons dû réaménager les emplois du temps que la démarche de bénévolat profite à tous.
Quelles sont les conditions pour s’engager comme bénévole ?
Un bénévole a besoin de huit heures de disponibilité par mois. Il faut une heure à une heure et demie par semaine.
Chaque mois, il y a une présence obligatoire à un groupe d’échange supervisé par un psychologue.
Pour ce qui est des qualités, il faut avoir une certaine capacité d’écoute, d’ouverture d’esprit et d’empathie. On doit toujours rester dans la bienveillance et le non-jugement.
On essaie toujours d’avoir une certaine concordance entre l’âge du bénévole et de la personne qui nous contacte. Souvent, les bénévoles s’engagent après trente ans.
Qu’est-ce-que la dynamique du bénévolat vous apporte personnellement ?
C’est drôlement intéressant. On ressent le dynamisme des plus jeunes. On a une expérience qui devient joyeuse et dynamique. Je ne me sens pas seule à accompagner, le travail est fait en groupe. C’est chouette de se sentir utile.
A posteriori, avez-vous des retours sur les accompagnements ?
Quand l’accompagnement se termine au bout de dix-huit mois, des bénévoles se réunissent avec la personne accompagnée pour amorcer la transition de fin de suivi. La rupture n’est pas brute.
On a beaucoup de retours très agréables en ce moment. Nous avons parmi les bénévoles, des référents qui appellent ponctuellement les anciens bénéficiaires pour s’assurer de la totale rupture avec cet état de solitude. Ceux qu’ils appellent sont en énorme majorité très satisfaits.
De nombreuses personnes qui ont été accompagnées parlent ensuite d’Astrée autour d’eux. D’autres, après quelques années, nous ont déjà sollicités une seconde fois pour un nouvel accompagnement.
Avez-vous quelque chose à ajouter ?
Les accompagnements sont gratuits, anonymes et confidentiels. Il ne faut pas hésiter à nous solliciter.
Amélie BONIFACE
Contacts de l'association Astrée :
03 59 54 11 35
lille@astree.asso.fr