Piétonpinion :
"Les micros-trottoirs m'aident à ne plus me mettre de barrières sociales. "
Cela fait maintenant 9 mois que Aurélien, alias Piétonpinion, arpente la Grand'Place micro en main, avec son ami derrière la caméra.
Ensemble ils interrogent les passants sur des sujets d’actu ou des questions auxquelles ils n’ont pas de réponse universelle.
Si les réactions sont souvent très positives, Piétonpinion a aussi dû faire face à des « faux bad-buzz » et des comportements difficiles dans son panel.
Cette expérience sociale reste toutefois riche pour celui qui apprend à vaincre sa timidité.
Est-ce que tu pourrais te présenter en quelques mots pour celleux qui ne te connaissent pas encore ?
Je m’appelle Aurélien, j’arrive sur la trentaine, je me fais vieux.
J’ai créé Piétonpinion en décembre dernier. Je fais des microtrottoirs où j’interroge les gens sur des questions diverses et variées.
Le média commence à prendre un petit peu, ça fait plaisir donc j’essaie de continuer sur cette lancée !
J’ai la fibre communicationnelle mais je me considère comme introverti. Plus il y a de gens et plus ma batterie sociale diminue. En revanche quand il y a des échanges dynamiques et intéressants, ma batterie sociale augmente. Le microtrottoir, c’est l’équilibre : je suis à la fois épuisé et rempli d’énergie grâce aux interactions sociales.
D’où t’es venue l’idée de ce concept ?
J’avais créé avec un pote une liste de 900 questions sur Excel. On s’est dit que pour obtenir des réponses, la meilleure solution était d’aller demander aux gens dans la rue pour recueillir un max de réponses.
Là, on a des réponses variées, et le rendu est assez visuel pour les réseaux sociaux. C’est vraiment parti d’une curiosité générale.
Comment choisis-tu tes questions ?
On avait l’intention de créer un jeu de société avec, mais cela existait déjà.
J’ai parcouru les 900 questions pour en faire un top et poser les meilleures questions au début. Et au fur et à mesure des interactions, cela donne d’autres idées de questions, de l’inspiration.
Est-ce que c’était un besoin de reconnecter avec les gens après la pandémie ?
Pas du tout ! J’étais en Australie au moment de la pandémie. En revanche c’est un besoin de sortir de ma zone de confort. Lors de la première session de questions je stressais de savoir si les gens allaient être réceptifs…
D’ordinaire, je planifie tout dans le moindre détail mais le microtrottoir c’est tout l’inverse, il faut se lancer sans filets. J’ai appris à ne plus avoir de barrière sociale.
D’autant que les gens ont l’air plutôt bienveillants non ? Ils n’ont pas peur du setup micro-caméra ?
Dans ce qui n’est pas diffusé, il faut aussi voir que 2 personnes sur 3 refusent. Refusent poliment, d’autres m’envoient balader, m’ignorent. Un type de recalage récurrent, c’est un groupe qui t’esquive comme si tu n’existais pas. Les gens ne sont pas tous bienveillants mais une fois au micro cela se passe bien et j’essaie de les mettre le plus à l’aise possible.
Est-ce que tu as eu droit à des moments gênants ?
Certaines blagues ne passent pas du tout, dans ce cas c’est ma faute : je ravale ma salive et je passe à la question suivante.
Mais certains m’offrent des situations gênantes, comme cette fois où un homme hurlait volontairement dans le micro, en faisant un monologue d’un quart d’heure. Son « show » n’a jamais été diffusé.
As-tu déjà dû censurer des propos ?
Oui… Je demandais à un homme la question qu’il voudrait poser aux femmes. Il m’a répondu « Pourquoi non veut parfois dire oui ? ». Et malheureusement j’en ai régulièrement, c’est assez symptomatique dans notre société.
Mais beaucoup font la « blague » et ensuite s’autocensurent, n’assument pas ce qu’ils viennent de dire. Ce sont ceux qui font le plus le show qui demandent de ne plus y apparaître, devant le succès ou les réactions de la vidéo.
Tes meilleurs souvenirs à l’inverse c’est quoi ?
En préparant les questions j’essaie d’anticiper les réponses pour rebondir. Mais je suis toujours surpris et j’obtiens des réponses et des points de vue que je n’aurais pas si je ne faisais pas ces interviews.
Je me rends compte vraiment que chacun a une personnalité unique, avec des opinions politiques divergents. Je ne refais pas le monde mais c’est important de voir toutes ses différences qui font que chacun.e est unique.
Est-ce que tu es (re)connu ?
On ne me reconnaît pas mais si je recroise des interviewés, ils viennent me parler de leur passage, c’est cool ! Si je pose une question récurrente comme celle des sosies, ils me reconnaissent comme « celui qui fait ça ».
Est-ce que tu as « bad-buzzé » ?
J’ai fait 2 vidéos beaucoup critiquées par les féministes, sur les avantages d’être un homme ou une femme. Certaines femmes se sont senties dégradées par les réponses et mon montage, et m’ont accusé de sexisme et misogynie.
Les sujets homme/femme sont ceux qui crispent le plus. Les femmes critiquent les réponses des hommes ou m’accusent de choisir les passages des femmes pour dégrader leur image…
Le féminisme est omniprésent, ce qui est une bonne chose. Là où c’est tabou, c’est que les féministes qui font le plus parler d’elles sont des extrêmes. On pourrait croire que c’est ça alors que non, le féminisme n’est pas extrême.
Est-ce que tu arrives à en vivre ou au moins en tirer un revenu ?
Je n’en vis pas, j’ai eu 5 demandes de partenariat dont le premier à 250€…. Ce n’est pas ce qui va me faire vivre. C’est tellement aléatoire que je ne sais pas si je pourrais en vivre, mais ça me plairait forcément. Le principal, c’est de réussir à rassembler encore plus de monde, pour faire de plus gros projets, me renouveler.
Arthur PUYBERTIER