Antoine Vitérale :
"Le foot finit toujours par me rattraper."
Franco-italien, mais né à Hong-Kong, Antoine Vitérale a beaucoup voyagé pour réaliser son rêve de footballeur professionnel.
Un voyage pas toujours rose, qui relativise le métier de sportif professionnel, idéalisé par beaucoup.
Aujourd'hui à deux pas de la sélection de Hong-Kong, il revient pour MØNEO sur son parcours atypique, rempli d'enseignements.
De quand date votre passion pour le foot ?
Ça fait longtemps ! Mon père m’a appris et donné cette passion. Il voulait devenir professionnel mais n’a pas réussi. J’ai accompli ce rêve qui était le mien mais aussi le sien.
En grandissant à Hong-Kong, on ne voyait les grandes stars qu’à la télé car elles se trouvaient toutes en Europe. C’était tellement loin pour moi, né à Hong-Kong, de m’imaginer un jour professionnel mais j’y suis parvenu.
Beaucoup vous qualifie de citoyen du monde, êtes-vous d’accord avec cette appellation ?
Mon parcours me fait dire que je suis un citoyen du monde. Je suis franco-italien, né en Asie, mes parents habitent à Singapour… Je suis un citoyen du monde
Est-ce que vous diriez que ces origines cosmopolites vous ont forgé ?
Complètement. Je suis très content d’être né en Asie et d’avoir eu toutes ses expériences ensuite. Voir d’autres cultures, d’autres manières de vivre, m’a beaucoup forgé.
J’ai beaucoup bougé et j’ai appris à communiquer avec des gens du monde entier en apprenant chacune de leurs langues...
Anglais, italien, français, espagnol... et là, avec le foot à Hong Kong j’ai commencé à apprendre le mandarin. Je trouve ça important de pouvoir communiquer dans la langue locale, d’autant plus que je veux vraiment que ça fonctionne avec la sélection hong-kongaise.
Le coach parle anglais mais les joueurs entre eux parlent mandarin ou des langues régionales. C’est une preuve de respect.
Vous grandissez donc à Hong-Kong, comment est la vie là-bas ? Les gens sont passionnés ?
Ils adorent le foot ! Le seul problème est que les Hongkongais sont « trop fans » de la Premier League anglaise. De ce fait le football local est mis de côté ou au second plan.
Tous les jeunes jouent au foot, il y a des terrains partout, en béton.
À vos débuts vous êtes repéré par l’Inter, qui ne vous conserve pas. Comment vivez-vous votre formation ?
Honnêtement j’étais juste content de quitter Hong-Kong. Je voulais aller en Europe pour essayer de passer pro. Quand un grand club comme l’Inter m’a dit que je n’avais pas le niveau, forcément ça fait mal mais je savais que je n’étais pas prêt.
Le foot en Asie n’est pas du tout pareil qu’en Europe. Jouer dans des plus petits clubs m’a permis de m’adapter, je me sentais plus prêt ensuite.
Le foot asiatique est-il vraiment différent du foot européen ?
Oui ! En Europe, les gamins sont beaucoup plus prêts physiquement, et de plus en plus tôt. Les séances étaient beaucoup plus intenses. Quand je jouais en jeunes, l’Europe était beaucoup plus structurée, avec des coachs, des infrastructures tandis qu’en Asie ce n’était pas très développé ni très pro.
Les jeunes en Europe jouent en Europe pour espérer être pro, en Asie le foot est vraiment un plaisir. Footballeur pro n’est pas un avenir en Asie.
Pour vous relancer dans le monde pro, vous signez à Singapour ! Pourquoi ce choix ? Pour vous rapprocher de votre famille ?
Je m’entraînais déjà avec la sélection singapourienne, dont le coach était français. J’ai été repéré par une équipe locale qui m’a proposé un vrai projet intéressant. C’était mon premier club pro en quelque sorte.
Je n’avais encore jamais joué en Asie en tant qu’adulte. C’était aussi à plus long terme la possibilité de voyager, pour jouer contre des équipes thaïlandaises par exemple. C’était un challenge qui devait se tenter.
Le foot asiatique est-il vraiment différent du foot européen ?
Oui ! En Europe, les gamins sont beaucoup plus prêts physiquement, et de plus en plus tôt. Les séances étaient beaucoup plus intenses. Quand je jouais en jeunes, l’Europe était beaucoup plus structurée, avec des coachs, des infrastructures tandis qu’en Asie ce n’était pas très développé ni très pro.
Les jeunes en Europe jouent en Europe pour espérer être pro, en Asie le foot est vraiment un plaisir. Footballeur pro n’est pas un avenir en Asie.
Pour vous relancer dans le monde pro, vous signez à Singapour ! Pourquoi ce choix ? Pour vous rapprocher de votre famille ?
Je m’entraînais déjà avec la sélection singapourienne, dont le coach était français. J’ai été repéré par une équipe locale qui m’a proposé un vrai projet intéressant. C’était mon premier club pro en quelque sorte.
Je n’avais encore jamais joué en Asie en tant qu’adulte. C’était aussi à plus long terme la possibilité de voyager, pour jouer contre des équipes thaïlandaises par exemple. C’était un challenge qui devait se tenter.
Vous poursuivez en Suisse puis au Portugal. Est-ce qu’à un moment, le fait de ne pas être « stable » vous a inquiété ?
C’était vraiment quelque chose qui me dérangeait et qui dérangeait ma famille. J’adore la vie de footballeur pro, mais je n’aimais pas le ait de bouger tout le temps.
Je n’arrivais pas à créer des connexions avec les gens, nouer des amitiés : c’était dur. J’étais toujours tout seul car je repartais sûrement à la fin de l’année
En 2020, vous débutez une nouvelle aventure au Portugal, pendant la pandémie, et votre corps n’est pas épargné par les blessures. Était-ce l’épreuve la plus difficile de votre carrière ?
C’était la période la plus difficile de ma carrière, voire de ma vie.
J’adorais le club, le pays, mais j’ai vécu une année d’enfer avec les blessures. Je ne savais pas s’il y avait le problème était physique ou mental. J’avais l’impression que tout tombait sur moi d’un coup.
Je me suis fait opérer, et avant de signer un contrat avec un autre club portugais, J’ai voulu arrêter.
Vous avez donc mis votre carrière en pause à l’été 2021 ; c’était un besoin ?
À l’origine cette pause devait être définitive. J’avais dit à mon agent : « le foot, ce n’est plus possible pour moi, je veux arrêter ».
Je voulais passer à autre chose, ne plus vivre comme ça. La vie de footballeur, ça peut être très dur pour beaucoup de joueurs.
Je ne pouvais pas rentrer en Asie avec les restrictions. Ma famille en France est en Bretagne donc je suis resté quelques mois en vacances là-bas, sans foot, pour prendre du repos, du recul.
Qu’est-ce que vous envisagez pour la suite ?
Je suis encore en train de réfléchir. Après mon stage à Hong-Kong avec l’équipe nationale, j’ai discuté avec le coach. Il veux que je prenne le passeport, la nationalité ; et que je remonte au niveau pro, en France ou ailleurs.
Je suis très attaché à Quimper, qui est certes en amateur mais a l’ambition de retrouver le niveau national. Je reconstruis ma vie en Bretagne. Mais le niveau pro me manque beaucoup.
Vous avez joué un match amical avec l’équipe nationale de Hong-Kong. Qu’avez-vous ressenti à cet instant ?
C’est un peu un rêve. Il y aura la coupe d’Asie au Qatar en janvier 2024. On jouera contre des grosses équipes asiatiques dans les mêmes stades que la Coupe du Monde. Quand je vois où j’étais il y a deux ans, où j’avais presque fini le foot, ce sont des émotions énormes. Je veux tout donner dans le foot, pour moi, mes parents qui ont fait beaucoup de sacrifices ; et pour Hong-Kong mon pays de naissance.
Arthur Puybertier
Vous finissez par retrouver les terrains il y a un an et demi à Quimper, en R2, comment est-ce que ça s’est fait ?
En arrêtant le foot, j’avais repris le tennis dans le club de ma ville. C’est là que les gens ont commencé à parler de « l’ancien joueur pro ». J’ai alors reçu un appel de club de foot de Quimper qui me proposait de juste venir m’entraîner avec eux.
Le foot finit toujours par te rattraper, te manquer. Donc j’ai dit oui. C’était pour jouer pour le plaisir. Je ne pensais plus à l’argent, ni à rien d’ailleurs. J’avais perdu la passion et besoin de la retrouver.
Cette aventure se passe plutôt bien d’ailleurs, est-ce que c’était la voie de l’apaisement ?
Tout à fait, et je veux remercier le club de Quimper pour ça. C’est grâce à eux que je suis là, que j’ai retrouvé la passion.